Japon
Les esprits de
la montagne
Les Kamis – en interconnexion avec la nature – sont des divinités, des esprits ou des forces sacrées dans la religion shintoïste du Japon. Ils jouent un rôle essentiel dans la relation entre l’homme, la nature et le divin.
Ces entités spirituelles liées aux éléments naturels, aux ancêtres déifiés et à des notions comme la prospérité, la fertilité ou la protection ont une place prépondérante. Elles ont influencé la littérature, la musique, la philosophie et sont souvent représentées dans des œuvres plastiques. Associées à des légendes et des croyances depuis les temps anciens, les montagnes sont considérées comme les demeures de ces fameux Kamis.
Pendant la période hivernale, au moment où la végétation se met en sommeil, les sommets recouverts de neige deviennent plus mystérieux et parfois inquiétants, accentuant leur aura mystique et sacrée.
Carte
Paysage – Vibrations
Dessiner la nature
Interprétation
Immersion
Cette après-midi une tension dans l’air est palpable. La morsure du vent causée par le grésil et les rafales est intense. Le brouillard se dissipe furtivement, pour vous envelopper à nouveau au point d’en perdre l’orientation et la raison. La météo joue un requiem et offre des expressions picturales où chaque coup de pinceau est imprégné d’émotion ; le trait animé vous sort de l’engourdissement. Voilà où mon esprit vagabondait, alors que transi, cherchant à protéger mon objectif de ces conditions météo exécrables, je tentais d’immortaliser un peu à l’aveugle ses éphémères moments fantasmagoriques.
L’art du « sumi-e » a me semble-t-il, le pouvoir de sublimer la représentation de ce qui nous avait émerveillés.
Paysages hivernaux
Tracés monochromes
Interprétation monochromatique
Le sumi-e est introduit au Japon au XIIe siècle. Cette technique artistique trouve son origine dans la Chine ancienne. Elle a été largement adoptée et développée au Japon. Ce mouvement de la peinture connaîtra l’une de ces périodes les plus remarquables lors de l’époque Edo (1603-1868). L’artiste en connexion profonde avec la philosophie zen est concentré au point de ressentir intérieurement la nature et d’en capturer l’essence.
Paysage hivernal – Translation
L’artiste mélange avec délicatesse ses pigments et l’eau sur une pierre naturelle nommée suzuri jusqu’à obtenir la consistance désirée de l’encre. Il choisit méticuleusement son pinceau dont les caractéristiques de flexibilité, de texture et de capacité à retenir le liquide sont importantes. Il est maintenant prêt à tracer ses premiers traits sur une feuille de papier Washi traditionnel. Ce papier est le fruit d’un long processus de fabrication appelé Nagashi-zuki. Réalisé manuellement, il est principalement fabriqué à partir de fibres végétales de mûrier kozo récoltées pendant les mois les plus froids. La fin de l’hiver est la période idéale pour sa fabrication, l’eau utilisée naturellement gelée est exempte d’impuretés. Ses caractéristiques font qu’il est réputé pour absorber l’encre de manière distinctive.
Paysages hivernaux
L’art du trait
Le peintre se concentre sur l’essentiel. Il va chercher par la simplicité et la spontanéité de son trait à exprimer ses émotions. Une symbiose où les alternances de zones sèches et de zones encrées monochromes vont subtilement donner vie à l’œuvre. Les traits évoquent le mouvement et donnent vie à des matières. Lignes fines et délicates, coups vigoureux, lavis diaphanes, représentation émotionnelle et interprétations subliment la nature profonde de la réalité.
Paysage hivernal
Alpes, japonaises
Toyama – Takayama
Un japon rêvé
Il est 7h30 lorsque le train rentre en gare de Toyama. Le quai est désert et à notre grande surprise nous ne sommes que trois personnes dans le wagon. Il s’élance pour un trajet d’environ deux heures qui va traverser les préfectures de Toyama et Gifu avant d’arriver à notre ville de destination – Takayama – dénommée la petite Kyoto des alpes japonaises. Un léger manteau blanc recouvre délicatement les paysages que nous traversons.
Lac – Ondulations
Le train serpente extrêmement lentement permettant une observation attentive des panoramas. Les arbres saupoudrés de neige surplombent de nombreux lacs dont les eaux ondulantes offrent des reflets argentés. Aux prémices de la première vallée, quelques rares plaqueminiers arborent fièrement leurs kakis orangés, éloge et ornementation de fêtes de fin d’année. Leurs fruits demeurent de surprenantes et éclatantes touches de couleur dans ce paysage à la polychromie fanée. Cette traversée matinale est un murmure poétique. Dans le confort de ce wagon silencieux, le temps semble suspendu sur la vision d’un Japon feutré. L’ambiance brumeuse semble nous offrir des intervalles confidentiels, ceux d’un Japon rêvé avant d’être admiré.
Snow monsters – Mont Zao
Phénomène Climatique
Conditions météorologiques particulières
Le dieu du vent
Le Mont Zao connu pour ses conditions climatiques particulières est situé dans la préfecture de Yamagata. Les hivers y sont souvent rigoureux. Dans un jeu subtil de hautes et basses pressions, les phénomènes atmosphériques déplacent un dense air froid sibérien vers l’est en direction de la mer du Japon. À l’approche du Mont Zao, la condensation de l’humidité transportée par ces vents est propice à la précipitation de fortes chutes de neige.
Snow Monsters
Mont Zao
Snow monsters – Mont Zao
En hiver, le mont Zao est le théâtre d’une métamorphose de la végétation. La neige accumulée en masse est ciselée par une entité légendaire symbolisant la puissance des éléments : Fujin, le maître du vent. Fujin est souvent représenté avec son frère Raijin, le dieu du tonnerre. Cette fratrie inséparable façonne les éléments. Des formations de glace spectaculaires aux formes inattendues s’élèvent sur les versants de la montagne. Ces figures effrayantes et fantastiques nommées les snow monsters participent pleinement aux légendes et aux croyances locales.
Snow monsters – Mont Zao
Snow monsters
Juhyo
Les esprits de la nature
Accumulées sur les arbres, les épaisses et régulières couches de neige transformées en glace nous plongent dans un monde fantomatique, étrange et surnaturel. Les snow monsters, nommés – Juhyo – en japonais, sont une véritable curiosité. À croire que le mont Zao, en cette période hivernale est le lieu de ralliement des esprits de la nature. Dans une blancheur étourdissante, des silhouettes en nombre infini se dressent sur le flanc de la montagne comme une armée du silence. Ce même silence sporadiquement déchiré par un souffle gémissant propice à réveiller un sentiment d’inquiétude et d’isolement. Le conciliabule annuel des géants à l’encontre des si nombreuses actions qui déstabilisent l’équilibre environnemental a commencé.
Snow monsters – Mont Zao
Photo de famille
Étonnantes sculptures
Un monde en monochrome
La famille Barbapapa du mont Zao a adopté le monochrome mais a gardé cette capacité incomparable à se métamorphoser, le grand, le maigre, le petit joufflu, le gros trapu…
Malheureusement, le printemps venu, la famille connaît les affres climatiques. Une disparation annoncée qui atteint les formes abstraites et anthropomorphiques. Mais, grâce à la résilience effrénée qui les caractérise, la famille se régénère à l’arrivée de l’hiver. Une photo de famille toujours inédite, le vieux ridé nous a tristement quittés, mais le beau dodu est arrivé.
snow monsters
Photo de famille
Givre – Texture
Voilà pour cette saison hivernale. Les esprits nous ont fait tourner la tête. Les phénomènes que l’on sait pourtant naturels ont réveillé notre inconscient et influencé notre perception de la réalité. Il est parfois bon de laisser ses pensées vagabonder et de rêver de chimères.
Asie Pacifique
AP01 – Le delta du Mékong.
AP02 – Bagan, la plaine des temples.
AP03 – Lac Inle, au cœur du Myanmar.
AP04 – Sri Lanka, une nature généreuse.
AP05 – Le Shekhawati et sa région.
AP06 – Bundi, authenticité et douceur de vivre.
AP07 – Paysages Indonésiens.
AP08 – Fascinant Rajasthan.
AP09 – Naoshima et l’art comptemporain
AP10 – Japon, finesse culturelle.
AP11 – Japon, les esprits de la montagne.
AP12 – Le Sulawesi, le pays Toraja.
AP13 – Sulawesi, combats de coqs.